Le nez dans les instruments
Les pendules ont consommé leur divorce mais laisseront trois rejetons à charge. Un badin, un horizon artificiel et un altimètre, voilà les uniques vestiges de nos montures passées. Devant nous deux monochromes sombres trépignent d'impatience pour nous délivrer leurs mille secrets. "Master avionic ON", l'électricité réveille chaque pixel de nos nouveaux outils. Le tableau est splendide et ce qu'il laisse présager aussi. Mais avant de goûter à la réalité il nous faudra répéter notre numéro 30 heures durant dans un recoin froid et sombre de Stapleford. Et c'est dans ce petit bâtiment, juste à droite de l'entrée principale, que l'école abrite deux simulateurs de Diamond DA42.
C'est ici que nous réapprendrons à voler. Et c'est dans le modèle, qui a inspiré cette pâle mais utile copie, que nous conduirons notre premier vol aux instruments. Le Diamond DA42 Twinstar NG est un bimoteurs de nouvelle génération, tant au niveau des matériaux utilisés pour sa construction que de sa motorisation et de son tableau de bord.
Nous aurons l'occasion de reparler de la machine en elle même mais ce qui nous intéresse aujourd'hui c'est bien entendu le cockpit et l'intégration du Garmin 1000 pour remplacer l'instrumentation traditionnelle. Le système intègre deux écrans. A gauche le PFD ou Primary Flight Display. Il permet d'afficher toutes les données relatives au pilotage de la machine (attitude, vitesse, altitude, cap, vitesse verticale) et au suivi de navigation comme les indicateurs VOR, DME, ADF, ILS. Ces noms barbares désignent des balises utilisées pour la navigation en route et les approches aux instruments. Elles permettent aux avions de se rendre d'un point A à un point B en utilisant uniquement des procédures et des routes associées à ces balises. Avec ce procédé un aéronef est donc capable de voler dans la plupart des conditions météorologiques. Dans ce cas les règles changent, on ne vole plus à vue (VFR) mais aux instruments (IFR).
Sur le deuxième écran, le MFD ou Multi-Function Display, il est possible d'afficher de nombreuses informations complémentaires dont les paramètres moteur (charge en pourcentage, régime de l'hélice, températures et pressions), le carburant, les checklists, le plan de vol, mais surtout une grande moving map couplée à un GPS qui permet de suivre sa navigation en temps réel. Avant de sauter dans le simulateur nous avons pu nous familiariser avec cet outil grâce au G1000 trainer. On retrouve uniquement les 2 écrans du Garmin, et cela permet de naviguer dans les menus et sous menus, de passer du temps à découvrir toutes les fonctionnalités sans mettre en danger son compte en banque. Ensuite direction l'obscurité...
Steeve, notre nouvel instructeur, positionne la machine sur le parking de Cranfield. Cette première leçon servira à découvrir les paramètres et les différentes configurations du DA42, mais surtout de commencer les basics de l'IFR : les hold ou circuits d'attente. Le hold sur une balise NDB, avec les approches dissymétriques, font parties des exercices qui demandent le plus de travail. Nous décollons de la piste 21 de Cranfield puis après un éloignement dans l'axe revenons vers la balise NDB du terrain (CIT 850.0) à 2500 pieds. Le but de l'opération est de visualiser les situations d'overshoot et d'undershoot et de matérialiser la "gate" associée. La "gate" c'est la droite qui a pour origine la balise et qui passe par le dernier point du segment d'éloignement (outbound), c'est à dire le segment opposé à la balise, ou encore le point où nous commençons le virage pour revenir vers la balise. Chaque segment du hold dure 1 minute sans vent, nous travaillons ici sur un circuit main droite. Nous effectuons un premier circuit standard sans vent. En respectant les virages au taux 1 et la durée du segment outbound, nous retombons parfaitement sur la balise. Ceci donne une "gate" de 30°. Ensuite nous ouvrons sur la gauche le segment d'éloignement afin d'obtenir une grande "gate" (40°) et ainsi se retrouver dans une situation d'undershoot pour intercepter le segment de rapprochement. Enfin nous ouvrons sur la droite pour mettre en évidence un overshoot et une petite "gate" associée de 20°. Encore une fois, l'exercice est réalisé sans un souffle de vent dans un air complètement calme et il est peu probable que ce cas se présente dans la réalité. C'est un peu théorique mais grâce à cette manoeuvre nous pouvons maintenant détecter une situation d'undershoot ou d'overshoot et appliquer la technique pour y remédier. Et réjouissons nous, cela arrive beaucoup plus souvent que prévu !
Avant de se tourner les pouces à attendre dans un circuit, il faut d'abord trouver la clé pour y entrer. On en dénombre 3 sortes : direct, teardrop et parallel. L'entrée dans un circuit d'attente est déterminée par la position de l'avion par rapport à l'orientation du segment de rapprochement.
Ci-dessous nous avons donc une "parallel entry" sans vent. Après un passage à la verticale de la balise, il faut suivre un QDR parallèle au segment d'éloignement pendant 1min10 sec. Puis nous revenons vers la balise par un virage à gauche et rentrons dans le circuit d'attente.
Voici une "teardrop entry". A la verticale de la balise, la méthode consiste à suivre un QDR équivalent à celui de la "gate", ici QDR 060° vu qu'il n'y a pas de vent, et virer à droite pour intercepter le QDM du segment de rapprochement, ici QDM 270°. Bon je sais c'est vachement plus difficile et barbant à expliquer qu'à réaliser mais je vous jure qu'on s'amuse comme des fous à chaque fois... On peut constater que le circuit d'attente s'est terminé avec un petit overshoot.
Enfin, last but not least, deux exemples de "direct entry" sous différents angles d'interception du NDB. Ici ce type d'entrée se termine dans les deux cas par un undershoot.
Nous terminons la séance par une approche radar vector ILS (Instrument Landing System) piste 21, guidés par les conseils de Steeve car c'est une grande première. C'est l'approche utilisée sur la plupart des aéroports accueillants du trafic commercial, elle fournit une grande précision horizontale (localizer) et verticale (glide). C'est, entre autres, grâce à ce système que des avions disposant de l'équipement approprié peuvent se poser entièrement sous pilote automatique.
Depuis cette première séance nous avons volé une quinzaine d'heures dans le simulateur du DA42, effectué des départs standards et des intégrations dans les airways (routes aériennes). Un peu de patience et d'ici deux semaines nous devrions basculer du côté de la réalité.
Passionnant !
RépondreSupprimerJ'aime beaucoup l'intro racontée avec poésie :) C'est rassurant de t'entendre dire que t'amuses comme un fou sur les holds, parce que comme ça, sur le papier, ça à l'air un peu sec...J'ai hâte!
Merci ! Alors c'est comment le début de ton training ?
RépondreSupprimerSinon pour les holds je retranscris ici des informations digérées mais au début j'ai buté sur certain trucs. Et puis un jour tout s'est débloqué et maintenant nous essayons de prendre ça comme un jeu au lieu d'un cauchemar !