Courts instants


  Après ce petit interlude délicieux sur réacteur retour aux joies des hélices et au doux ronron des PT6. Le coeur de notre métier c'est bien entendu les vols médicaux et on peut dire que la saison commence plutôt bien. L'Espagne, le Maghreb, les pays Nordiques, nous retrouvons après une attente trop longue des accents familiers, signes que nous poussons nos machines au delà de nos frontières. Et j'avoue m'amuser particulièrement avec les spécialités locales. Des roulages de "R" bien accentués pour les Espagnols, des collationnements bien toniques pour les Italiens, et un soupçon de flegme pour nos amis Portugais. Nous apprécions glisser un petit mot dans la langue du pays survolé, histoire de rendre les échanges plus "friendly". Parfois la personne qui se tient devant son micro, à des centaines de kilomètres de notre position, n'est pas toujours d'humeur... Mais le plus souvent ils répondent avec une intonation qui trahit un petit sourire au bout du fil, heu pardon des ondes. 

La radio a été véritablement une hantise lors de mes premiers vols pour le PPL. Aujourd'hui cet exercice me rends particulièrement enthousiaste. J'y trouve autant de plaisir que lorsque je suis pilote en fonction et donc aux commandes. Négocier des directs, aller chercher de l'info, obtenir le meilleur niveau, signaler le déclenchement d'une balise sur 121,5, rester clair et concis, et puis nous pouvons moduler le ton de notre voix pour ajouter un peu plus de gravité ou de décontraction en fonction de la finalité désirée. Il faut aussi savoir respecter le travail des contrôleurs et ne pas les submerger de demandes inutiles. Quand nous sentons que notre interlocuteur est débordé, on lui fou la paix. La plupart du temps les initiatives viennent du sol; grâce au plan de vol ils ont conscience que nous sommes en vol hôpital et parfois nous obtenons une "direct parking" à peine le train rentré !


Dans ces premiers vols de la saison je retiendrai cette rotation sur Lisbonne avec une arrivée main gauche pour l'ILS piste 03. Il se trouve que la finale nous fait passer quasiment au dessus du grand pont du 25 Avril qui enjambent le Tage. Nous sortions de la grisaille française, du coup cet instant a été particulièrement savoureux. Sur place nous avons trouvé une équipe d'une extrême gentillesse, comme à Porto. Il y a juste le malchanceux soutier qui nous a rincé abondemment notre nacelle moteur avec du JETA1. On a beau dire d'y aller doucement, quand on envoie toute la pression du pistolet dans le petit réservoir auxiliaire, "lui toujours faire ainsi". Mais à sa décharge il faut connaître le truc.


Lors du vol retour, les astres de concert se sont disputés la meilleure place dans le ciel. A l'est la lune pousse le soleil vers l'ouest dans une noyade certaine aux confins de l'Atlantique. La suite vous la connaissez, passage des Pyrénées pour une direct vers Mende et une arrivée face au nord pour un ILS en piste 34 à Lyon. Et quand nous verrouillons la porte de l'avion signe que notre mission est terminée, on administre à notre ami une petite tape affectueuse signe de reconnaissance pour service rendu :

"Allez mon vieux à demain"


Commentaires

  1. En philosophant sur la dernière photo, je me suis rendu compte à quel point il est incroyable de pouvoir parcourir tant de kilomètres dans un si (relativement) pet objet crée par l'Homme!
    Alors que naturellement, voir des étoiles au dessus des nuages est impossile...

    RépondreSupprimer
  2. Quelle écriture Albéric, un régal à lire!

    RépondreSupprimer
  3. Merci pour vos commentaires, il serait peut être temps de faire un rassemblement de bloggueur un de ces quatre ?

    RépondreSupprimer
  4. Salut, génial ton blog.

    J'ai ouvert un plateforme de blogging spécialement dédié au monde de l'aéro : floght.com, si ça te dit de venir partager quelques uns de tes récits tu es le bienvenu ;)

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Articles les plus consultés